LE DELTA DU FLEUVE ROUGE ET LE TRIANGLE CLEF DU NORD 3
… Et cependant réputé fertile grâce au travail de l’homme
Pour vivre dans la plaine alors encore marécageuse, l’homme a élargi progressivement les zones élevées dans la plaine en défrichant les forêts, comblant les lacs et les marécages. Les activités agricoles de riz irrigué et de pêche ont commencé très tôt.
Comme encore de nos jours, cette zone était menacée annuellement par des inondations, quoiqu’avec une intensité beaucoup moindre. Pour se protéger, la population de Thâng Long, dès le Xle siècle, construisait les digues Co Xâ, et pendant les dynasties suivantes, érigeait un gigantesque ouvrage de digues se prolongeant du sommet du delta jusqu’à la mer. De nos jours, ce réseau de digues a une-longueur de plus de 1.600 km, évaluée à des milliards de USD.
Par la construction de ces digues, l’homme a bloqué la déposition des alluvions en hauteur et en largeur dans la plaine. « Le delta du Fleuve Rouge est mort dans sa jeunesse », le disait P. Gourou d’une façon imagée, et il avait raison.
Ainsi, le relief du delta est bas avec des cuvettes, incliné du nord-ouest (sommet du delta) au sud-est (mer). A Viêt Tri et Son Tây, l’altitude de la plaine atteint en moyenne 12-16m, et parfois de 18 à 25m, comme sur la plate-forme d’anciennes alluvions. En terre côtière de Hài Phong à Ninh Binh, elle n’est plus qu’aux environs d’ 1 m. Les cuvttes à l’intérieur de la plaine sont encore plus basses, par exemple dans le secteur Phù Cu (de l’ancien Hung Yen), que V. M. Fridland considérait comme le nombril du delta.
Ainsi, l’homme a transformé progressivement le delta du Fleuve Rouge en un grand grenier. Les alluvions du Fleuve Rouge, les saisons ensoleillées, un réseau hydraulique développé et enchevêtré, et enfin, le labeur persévérant de l’homme à travers plusieurs générations ont permis à la plaine un aspect si riche et si peuplé. Mais on ne peut pas dire que toutes les conditions naturelles sont favorables : climat capricieux; sécheresse après pluies et typhons; sol changeant de propriétés sur des courtes distances allant des sols latérisés et infertiles sur des plates-formes d’anciennes alluvions, jusqu’aux sols à gley dans les cuvettes, sols alunifères, salins et acides aux régions côtières…
Néanmoins, l’homme savait vivre en harmonie avec la nature et l’utilisait à son profit. Parmi les différentes plaines du pays, seule celle du Fleuve Rouge a un hiver froid de 3 mois avec une température inférieure à 18°C (la température minimale peut descendre à 5°C). Un tel climat crée des difficultés à la riziculture, mais la culture du riz d’hiver-printemps a été créée avec un rendement encore plus élevé et plus stable que les récoltes traditionnelles. Dans son étude de classification des sols de la plaine, Fridland considérait que les alluvions de cette zone ne peuvent être appelés que « »sols du riz irrigué » (ou du sol férralitique modifié par la riziculture) au lieu des noms de la classification courante.
Ainsi, l’espace géographique de la plaine du Fleuve Rouge n’est pas simplement une zone géographique ordinaire. C’est la présence de Thang Long-Hanoï et la zone subissant son influence (une partie jointe à celle des pôles complémentaires Hai Phông, Nam Dinh postérieurement), qui a permis l’unité de la plaine du Fleuve Rouge au cours de l’histoire.
De nos jours, les 7 provinces de la plaine, les provinces se trouvant en partie sur les terrasses d’alluvions anciennes de Vïnh Phü à Bac Giang jusqu’au sud de Quâng Ninh sont reliées à la capitale par des échanges d’hommes, de marchandises et de services importants. Un réseau de routes, de voies fluviales et de voies ferrées relativement dense assure cette liaison permanente.