L’IDENTIFICATION DU VIETNAM 7
L’enchaînement de l’histoire : le passé et le présent
Les caractéristiques indiquées ci-dessus permettent dans une certaine mesure d’identifier le Vietnam pendant les années 90. Néanmoins, on ne peut se représenter nettement un pays, son niveau de développement indépendamment de son histoire. Ceci est d’autant plus vrai pour le cas du Vietnam.
Dans le monde contemporain, il est rare de trouver un autre pays ayant subi autant de bouleversements, non seulement politiques mais aussi socio-économiques, que le Vietnam, pendant la seconde moitié de ce siècle.
Bien que tous les bouleversements politiques au Vietnam soient déjà connus, il est nécessaire de les rappeler, non seulement à cause de leur importance, mais aussi pour mieux comprendre la situation socio-économique actuelle.
Le plus grand bouleversement politique est lié à la Révolution d’Août 1945, transformant le Vietnam colonisé et divisé en 3 portions territoriales, en une république démocratique libre, indépendante et unifiée. Le deuxième grand bouleversement est la scission du Vietnam en 2 parties (Nord Vietnam et Sud Vietnam) après l’Accord de Genève en 1954 par la ligne de démarcation provisoire au 1T parallèle de latitude nord. Le troisième est la réunification du pays le 30 avril 1975 et le Vietnam politiquement stable depuis lors, entra dans l’étape de reconstruction nationale en édifiant sa structure socio-économique à orientation socialiste.
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Chacun de ces bouleversements politiques entraîne une intervention militaire de l’étranger. Dans le premier cas. c’est le retour du corps expéditionnaire français, dans le but de rétablir la domination des colons français en Indochine comme avant la Seconde Guerre mondiale. La réaction des Français — comme Paul Kennedy l’a constaté — « en qualité d’anciens colonisateurs, aurait été la même, si le communisme n’avait pas existé à l’est du canal de Suez » . Dans le deuxième cas quand les forces armées américaines intervinrent en Indochine, et avant tout au Vietnam, pour protéger « le monde libre », le problème est devenu beaucoup plus compliqué, car il faut examiner cette guerre dans le contexte d’un conflit entre les puissances dans un monde bipolaire. Le troisième cas se limitait seulement à l’intention d’affaiblir le Vietnam — sans éliminer les folles ambitions territoriales des Khmers Rouges — mais empêchait ce pays de se livrer au rétablissement et au développement économique.
Evidemment, tous ces bouleversements appartiennent au passé, mais restent si proches qu’il est difficile d’expliquer l’état socio-économique actuel du Vietnam sans y trouver des causes — ou au moins des influences — faisant que le Vietnam, —en comparaison avec les autres pays de la région — reste encore un pays pauvre et sous-développé.
Jusqu a ce jour, aucun document officiel n’est paru, qui cherche à évaluer en espèces (par exemple en or ou en USD) les dégâts grandissimes que l’économie du Vietnam a subis pendant plus de 30 ans de guerre. Naturellement, on ne manque pas de documents montrant que plus de 20% de la superficie des forêts tropicales de ce pays étaient dévastées par les bombardements et même par les produits chimiques toxiques, mentionnant des villes et des centres urbains rasés à plat, des ponts et des routes détruits, mais sans estimer les dégâts en argent. Mais il y a eu d’autres pertes qu’on ne peut valoriser en argent, comme le sacrifice des millions de Vietnamiens dans les guerres de 1945 jusqu’à la fin de 1979. Les évaluations, si elles étaient possibles, donneraient un chiffre de dizaines ou de centaines de milliards de US dollards qui auraient dû aider le Vietnam à avoir un niveau de vie meilleur que celui qui est le sien actuellement.
Les statisticiens, avec leur manie de classifier les pays suivant le niveau de développement, avancent souvent le chiffre indifférent de 200 USD par an en moyenne par habitant pour le Vietnam, et les Vietnamiens reconnaissent qu’ils ont raison. L’unique différence, pour le Vietnam, est que ce chiffre, apparemment bas, contient en lui tout un passé effervescent dont il a le droit d’être fier, et qui lui rappelle que s’il a pu faire l’impossible pendant la guerre, il devra certainement lutter d’une façon identique pour améliorer l’économie et élever le niveau de vie du pays en temps de paix.
Et pour comprendre le Vietnam, le passé ne peut se détacher du présent.